
3 arbres emblématiques du paysage méditerranéen à accueillir dans votre jardin
Dans ce premier article, je vous invite à partir à la rencontre de l’olivier, du cyprès commun et du chêne vert, trois arbres emblématiques de la végétation méditerranéenne que l’on rencontre fréquemment dans les mêmes paysages, en particulier lorsqu’on foule du pied les terres provençales. Là, au détour d’un sentier de garrigue, les oliveraies, nichées dans les rares replats des collines, sont protégées par de hautes et majestueuses haies de cyprès, tandis qu’en toile de fond, les chênes verts semblent gravir patiemment les reliefs calcaires et escarpés.
Mais ce qui va nous intéresser ici, c’est bien de savoir comment accueillir ces arbres dans nos jardins. Il s’agira alors de mieux comprendre leurs principales caractéristiques, leurs besoins spécifiques mais aussi leurs possibles associations avec d’autres plantes méditerranéennes à travers des jeux de complémentarités, de contrastes et de perspective.
Je vous propose donc d’explorer ces subtilités à travers des conseils de paysagiste mais aussi des anecdotes souvent méconnues sur ces arbres pourtant si présents à nos côtés !
Bonne lecture !
L’Olivier Olea europaea
1
L’arbre symbolique des paysages méditerranéens
Voici certainement l’arbre le plus évocateur du jardin méditerranéen. Et pour cause, l’olivier est cultivé en Méditerranée depuis le Néolithique ! Sa domestication a probablement commencé il y a environ 6000 ans au proche Orient, période à partir de laquelle l’antique oléastre (olivier sauvage) est peu à peu transformé par l’Homme et dont la culture, associée à celle du blé et de la vigne, constituera la fameuse triade méditerranéenne.
Hautement symbolique, cet arbre vénérable est aussi présent dans de nombreux mythes fondateurs. Ainsi, dans les textes bibliques, Noé, lors du Déluge, reçoit une colombe portant un rameau d’olivier dans son bec. Par cette apparition, il comprend alors que les eaux sur terre se sont retirées et ce moment marque alors la réconciliation entre Dieu et les Hommes. Depuis, l’olivier est resté un symbole de paix universelle.
Aujourd’hui, largement répandu dans les jardins où il est planté le plus souvent à des fins ornementales (ce qui n’empêche pas de récolter ses olives bien entendu), sa silhouette caractéristique et son ombre salvatrice sont de précieux atouts pour qui souhaite retrouver au quotidien, l’atmosphère des paysages méditerranéens.

Hauteur : jusqu’à 10m
Largeur : de 6m à 10 m
Exposition : soleil, à l’abri des vents froids
Feuillage : persistant, feuilles étroites et coriaces. Vert gris et argenté sur le revers.
Floraison : petites fleurs jaunes d’avril à juin. Olives vertes puis noires à maturité
Sol : indifférent, bien drainé, tolère bien le calcaire
Rusticité : -12° à -15°
Quand planter ? De novembre à fin mars (hors périodes de gel)
Quand tailler ? En février (en fonction des régions après l’hiver rigoureux et avant la floraison)
Les conseils du paysagiste
Non au pillage !
Commençons par un point important : Ne succombez pas aux oliviers pluri-centenaires voire millénaires qui sont proposés dans de nombreuses pépinières. Ces arbres sont la plupart du temps arrachés à leur terre originelle et vendus sur le marché international, dépossédant ainsi des régions entières (comme la Catalogne ou l’Extrémadure) de leur patrimoine végétal et culturel. Préférez des oliviers jeunes (entre 5 et 20 ans) qui auront tranquillement le temps de s’acclimater dans votre jardin.
Le vent, votre allié esthétique
Les feuilles de l’olivier arborent un vert profond dessus et argenté sur le revers. Le vent, lorsqu’il souffle dans ses branches, souligne l’aspect argenté de son houppier. Servez-vous de ce facteur environnemental pour renforcer cet effet de scintillement en installant par exemple des arbustes avec un feuillage vert, vif et brillant en arrière-plan de vos oliviers comme le Pistachier lentisque (Pistacia lentiscus) ou encore l’Arbousier (Arbutus unedo).
L’arbre qui danse
La silhouette de l’Olivier est caractérisée en grande partie par son tronc souvent tortueux, très structuré. Mettez en valeur ce trait morphologique en installant au pied de vos oliviers des plantes vivaces à feuillage persistant que vous pourrez maintenir en boules et en coussins comme la Lavande dentée (Lavandula dentata), la Santoline du Portugal (Santolina lindavica) ou encore l’Anthyllis faux cytise (Anthyllis cytisoides). L’olivier semblera alors sortir d’un dense couvert végétal dans un mouvement souple, exprimé par la légère torsion de son tronc.
Installez-le en famille
L’Olivier fait partie de la famille des Oléacées tout comme le Filaire à feuilles larges (Phillyrea latifolia)) et le Filaire à feuilles étroites (Phillyrea angustifolia). Les filaires et les oliviers ont de nombreux points de ressemblance comme leur port général ou encore la forme et l’aspect de leurs feuilles. N’hésitez pas à les installer à proximité pour jouer sur leur complémentarité. De loin, les filaires et les oliviers sembleront sensiblement identiques alors que de plus près, ils révèleront à l’observateur attentif leurs multiples différences. Une manière simple et ludique d’aborder la botanique au jardin.
Le saviez-vous ?
La culture de l’olive est fortement impactée par un insecte ravageur : la mouche de l’olive (Bactrocera oleale). Afin de lutter contre cet insecte, vous pouvez planter au pied de vos oliviers l’Inule visqueuse (Dittrichia viscosa), (que vous avez certainement vue de nombreuses fois sur le bord des routes et des chemins sans vraiment la remarquer). L’inule visqueuse attire en effet un insecte parasite (Eupelmus urozonus) qui se nourrit des larves de la mouche de l’olive, freinant ainsi le développement du ravageur. De plus, ses belles fleurs jaunes qui apparaissent à l’Automne attirent de nombreux pollinisateurs et constitueront un atout esthétique indéniable pour votre jardin !
Le Cyprès commun Cupressus sempervirens
2
Le cyprès commun : un allié pour structurer votre jardin
Voici un arbre originaire d’Asie Mineure mais implanté dans le bassin méditerranéen depuis plusieurs millénaires (on ne sait pas vraiment le dater avec précision). Le Cyprès tiendrait son nom de Cyparisse, personnage de la mythologie grecque, descendant d’Héraclès. Cyparisse fut transformé en arbre par Apollon après avoir accidentellement tué un cerf que le dieu lui avait offert. Ainsi, le cyprès est resté symbole de deuil mais aussi de vie éternelle. C’est aussi pour cette raison qu’il est courant de le retrouver dans les cimetières ou à proximité.
Mais si le cyprès est présent aujourd’hui dans de nombreux jardins méditerranéens, c’est en grande partie en raison de sa capacité à constituer une trame végétale ou encore de signifier la présence d’un bâtiment ou d’un point de vue particulier. Il peut être alors être planté en sujet isolé ou en petit groupe. On le retrouve aussi fréquemment en bordures d’allées et de chemins pour guider le visiteur.
Hauteur : entre 20 et 30 m.
Largeur : de 1m à 2m
Exposition : soleil. Supporte très bien les vents, même violents et froids.
Feuillage : persistant, vert foncé. Port colonnaire, fastigié.
Floraison : petites fleurs vert-jaunâtre de février à avril.
Sol : indifférent, sec, bien drainé, tolère bien le calcaire
Rusticité : -15° à -20°
Quand planter ? De novembre à fin mars (hors périodes de gel)
Quand tailler ? Au début du printemps (mars – avril) et à la fin de l’été (aout- septembre)

Les conseils du paysagiste
L'ami des chemins
Le feuillage dense et sombre du Cyprès est particulièrement mis en valeur quand il borde des allées minérales ainsi que les murs et murets en pierre. Au soleil d’été, les saisissants contrastes entre l’éclat du calcaire, des ocres et la profondeur des teintes du cyprès agissent comme une allégorie des paysages méditerranéens. Pour accompagner cet effet, vous pouvez concevoir un gradient de contrastes en plantant au pied de l’arbre des plantes vivaces à feuillage argenté comme la Tanaisie d’Arménie (Tanacetum densum) ou encore l’Armoise arborescente (Artemisia arborescens).
Une protection efficace
Le cyprès commun est souvent planté en haie (distance entre 2 arbres comprise entre 1m et 1m50), notamment dans le but de protéger du vent certaines parties du jardin qui y sont plus sensibles comme le potager ou les zones de plantes laissées en pot qui pourraient plus rapidement sécher. Avant de planter une haie de cyprès (et plus généralement tout type de haies), prenez le temps de comprendre le sens des vents dominants dans votre jardin. Sur un plan, notez leurs chemins qui peuvent parfois être modifiés par des végétaux ou bâtiments déjà présents sur votre terrain. Important à savoir, ces vents peuvent avoir tendance à accélérer en passant entre les bâtiments et les parois rocheuses. Il s’agit de l’effet Venturi dont le principe est que la vitesse d’un fluide (en ce qui nous concerne, le vent) augmente au niveau d’un étranglement.
Le roi de la perspective
Le Cyprès commun peut aussi être utilisé pour cadrer une vue intéressante dans votre jardin ou sur le paysage lointain (notamment depuis un point haut ou un promontoire). Vous pourrez alors le planter en paire plus ou moins espacée en fonction de la vue recherchée. Il est aussi possible de planter une ligne de cyprès afin de renforcer un effet de perspective dans le jardin ou encore pour créer un lien visuel entre votre jardin et le paysage lointain. Inspirez-vous alors des grands maîtres Florentins de la Renaissance qui savaient à merveille ponctuer les perspectives paysagères par ces magnifiques arbres au port fastigié.
Le saviez-vous ?
En Provence, le cyprès est un symbole d’hospitalité. La tradition veut qu’on plante un, deux ou trois cyprès à proximité de la maison ou à l’entrée du jardin.
Un cyprès signifie que l’on offre au visiteur la possibilité de se désaltérer.
Deux cyprès et ce même visiteur pourra aussi venir manger
Et enfin, comble de l’hospitalité,
Trois cyprès annoncent le gite en plus du couvert.
Le Chêne vert Quercus ilex
3
La Yeuse des collines dans votre jardin
Quand la garrigue se referme et devient peu à peu impénétrable, elle prend alors la forme de chênaie verte désignant à la fois le peuplement de chênes verts mais aussi tout le cortège des plantes méditerranéennes qui lui est associé, constitué de pistachiers lentisques (Pistacia lentiscus) et térébinthes (Pistacia terebinthus), de genévriers cades (Jupinerus oxycedrus), les filaires (Phillyrea angustifolia et Phillyrea latifolia) ou encore de lauriers tins (Viburnum tinus).
Cet arbre au feuillage persistant dont la taille peut varier de 5m à 20 m est particulièrement adapté à la sècheresse. Il résiste même très bien au feu, produisant rapidement de nouveaux rejets à partir de sa souche brulée. Ces incroyables propriétés de durabilité ont peut-être participé à la légende du chêne vert, cité depuis la haute antiquité. Décrit tout d’abord comme l’arbre de Zeus en raison de sa robustesse et de sa propension à être peu touché par la foudre, il fut dès lors considéré comme symbole de force et de sagesse.
Bien qu’il ne soit plus trop d’usage de le nommer ainsi, le chêne vert a aussi pour nom commun la Yeuse (passant du masculin au féminin !), dérivé de l’Occitan Euse, lointaine variante d’Ilex, son nom latin. C’est d’ailleurs sous cette appellation que nous le retrouvons dans de nombreux écrits comme ceux de Giono dédiés à la Provence dont sont extraites ces quelques lignes (il est alors question du terrible épisode de gel en 1956) :
« Car non seulement les oliviers sont morts, mais les yeuses, les pins et, d’une façon générale, tout ce qui permettait ici de comprendre mieux Virgile et ce qui a fait Virgile. »
Jean Giono- Traditions et changements – Sur les oliviers morts. 1956

Hauteur : jusqu’à 20 m mais la plupart du temps de 5m à 10m.
Largeur : jusqu’à 15 m environ mais la plupart du temps de 3m à 5m.
Exposition : soleil et mi-ombre
Feuillage : feuilles persistantes et coriaces, plus ou moins dentées, vert sombre à revers gris clair.
Floraison : petites fleurs vert-jaunâtre d’avril à mai.
Sol : calcaire et sec
Rusticité : -12° à -15°
Quand planter ? Novembre, avant les premières gelées.
Quand tailler ? Fin de l’Hiver (février-mars) et Automne (octobre-novembre)
Les conseils du paysagiste
Profitez de son ombre
C’est l’arbre idéal pour créer un espace ombragé dans le jardin en formant un bosquet dans lequel vous aurez pris soin de ménager au centre une petite percée ou clairière au sein de laquelle vous pourrez disposer une table et quelques chaises. Parfait pour partager un repas ou l’apéritif à l’abri du soleil d’été ou pour créer un lieu intimiste et propice à la sieste !
Définissez sa silhouette
Le chêne vert supporte très bien la taille, ce qui permet de le former selon les besoins du jardin. On peut le conduire en port libre, sans entretien particulier ou encore réaliser une taille en transparence, en supprimant les branches basses pour que la lumière se diffuse sous son houppier permettant alors à une strate plus basse composée d’arbustes et d’arbrisseaux comme le Romarin (Rosmarinus officinalis) ou la Germandrée arbustive (Teucrium fruticans) de pousser à son pied.
Le gîte et le couvert
Le chêne vert est un atout majeur pour la biodiversité au jardin. Il offre un habitat idéal pour divers oiseaux comme les geais et les grives, qui nichent dans son feuillage dense et se nourrissent de ses glands (favorisant ainsi sa dispersion naturelle). Les fleurs du chêne attirent des pollinisateurs tels que les abeilles et les papillons (le Flambé l’apprécie particulièrement), tandis que son écorce rugueuse abrite de nombreux autres insectes comme les coccinelles et les chrysopes, toutes deux utiles pour se débarrasser des pucerons et autres cochenilles ! Les écureuils et autres petits mammifères trouvent quant à eux refuge et nourriture dans ses branches, et les chauves-souris comme les Pipistrelles communes peuvent utiliser ses cavités comme gîtes.
Le saviez-vous ?
Les jeunes feuilles du chêne vert sont épineuses (c’est pourquoi un autre nom du chêne vert est le chêne faux Houx) alors qu’elles deviennent lisses sur les arbres adultes. Il s’agit en fait d’une stratégie adoptée par le chêne vert pour éviter le broutage des jeunes plants. En effet, les jeunes feuilles piquantes ne conviennent pas aux herbivores qui les laissent alors de coté au profit d’autres végétaux plus tendres. Ainsi, le jeune chêne vert peut tranquillement pousser sans avoir à craindre l’appétit des chèvres et autres féroces prédateurs !
Pour conclure…
L’olivier, le cyprès commun et le chêne vert, par leur histoire, leur symbolique et leur esthétique incarnent pleinement les paysages méditerranéens. Résistants à la sécheresse et adaptables à de nombreux types de sols dont les plus pauvres, ils ne demanderont que peu d’entretien et vous permettront de recréer chez vous l’atmosphère si particulière des garrigues méditerranéennes. Ils sauront parfaitement s’associer à d’autres plantes méditerranéennes, avec lesquelles vous pourrez créer de véritables compositions, jouant ainsi sur une grande diversité de sens.
J’espère que cet article vous aura intéressé et que ces quelques informations, conseils et anecdotes vous donneront envie d’accueillir ces arbres fascinants dans votre jardin. Si vous souhaitez échanger sur le sujet, n’hésitez pas à me contacter.
Je vous retrouve très bientôt pour un nouvel article consacré au jardin méditerranéen !
Damien Vieillevigne
COMMUNS paysage et écologie
Découvrir d’autres articles